L'Impressionnisme by Victoria Charles

Auteur:Victoria Charles [Brodskaïa, Nathalia]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9781783103669
Éditeur: Parkstone International
Publié: 2014-04-14T16:00:00+00:00

86. Pierre Auguste Renoir,

Le Ménage Sisley (Les Fiancés), vers 1868.

Huile sur toile, 106 x 74 cm.

Wallraf-Richartz-Museum, Cologne.

87. Pierre Auguste Renoir,

Le Cabaret de la Mère Anthony, 1866.

Huile sur toile. National museum, Stockholm.

88. Pierre Auguste Renoir,

Une Serveuse du restaurant Duval, vers 1875.

Huile sur toile, 100,3 x 71,4 cm.

The Metropolitan Museum of Art, New York.

Dès ce moment-là, les amis de Renoir figurent immanquablement dans ses tableaux. Le coloris de sa peinture ne devint pas encore, à la manière des impressionnistes, clair ; il rappelle plutôt les tons bitumeux de Courbet ou s’apparente aux couleurs brunâtres des portraits de groupe de Fantin-Latour, évoquant les vieilles photographies du xixe siècle. Toutefois, la composition du tableau est remarquable : les figures de la serveuse et du monsieur assis qui sont coupées par les extrémités de la toile, et le groupe de personnages formant presque un demi-cercle, créent une sensation d’espace réel. Certains spécialistes de l’œuvre de Renoir estiment que c’est justement Le Cœur, et non pas Sisley, qui se tient debout dans Le Cabaret de la Mère Anthony. Le Cœur fit passer à Renoir des commandes de portraits qui deviendront par la suite la source principale de ses revenus. Mais ce qui est le plus important c’est que, sans son intervention, Renoir n’aurait pas trouvé sa première muse, Lise Tréhot, la sœur de l’amie de Le Cœur. Elle posa pour Renoir de 1865 à 1872, étant devenue son amie et le premier modèle de ce monde particulier que le peintre commença à créer.

En 1866, il peignit la toute jeune Lise en train de coudre, rappelant un peu les modèles du peintre favori de Renoir, Vermeer. Un an plus tard, en 1867, il peignit Lise à l’ombrelle. Ce portrait réalisé en plein air, avec la légère ombre tombée sur le visage et la couleur rose du corps transparaissant à travers un tissu fin, fait écho à la Réunion de famille de Bazille et aux Femmes au jardin de Monet, annonciateurs de la peinture impressionniste qui allait se répandre trois ou quatre années plus tard. Pour le Renoir de cette période, le visage de Lise Tréhot devint le canon de la beauté féminine.

C’est pourquoi les spécialistes estiment qu’il est possible que, dans le Ménage Sisley, soit en fait représentée Lise. En 1870, elle apparaît sur une autre grande toile de Renoir : La Baigneuse au griffon. La pose classique de la Vénus de Cnide (on faisait souvent poser ainsi les modèles à l’école académique) ne dissimule pas, mais, au contraire, accentue le caractère individuel du visage, de la somptueuse chevelure sombre, des formes un peu lourdes de Lise. Quant au griffon, petit chien disgracieux, il enrichit ce monde classique d’un détail vivant et coutumier, l’apparentant ainsi à une mise en scène théâtrale.

Renoir devait, tout en l’ignorant lui-même, avoir un don de metteur en scène car tous ses tableaux postérieurs font penser à un spectacle théâtral. En 1870, Renoir peignit La Femme d’Alger. Il habilla Lise de soies fines et d’un brocart oriental scintillant d’or, coiffa sa belle chevelure d’un plumage orange et l’entoura de tapis luxueux.

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